Maje, marque engagée ou greenwashing ?
Bonjour et bienvenue à tous dans cette nouvelle édition.
Conscientes de l’intérêt grandissant des consommateurs dans l’engagement éco-responsable, de nombreuses marques de mode se définissent comme tel, tandis que la réalité est tout autre.
Mon objectif au travers de cette nouvelle édition ? Vous accompagnez dans le développement de votre analyse critique du greenwashing.
Maje, marque engagée ou greenwashing ?
Ce mois-ci, j’analyse avec vous la marque de prêt-à-porter premium, Maje. La politique RSE Maje, est-elle en accord avec les défis dont fait face l’industrie de la mode aujourd’hui ? La communication de la marque, est-elle en adéquation avec la promesse qu’elle propose ?
Les défis de l’industrie de la mode aujourd’hui :
Pour rappel, aujourd’hui, ce n’est plus un secret pour personne : la mode, ça pollue. L’urgence climatique n’est plus à démontrer et de nombreux consommateurs de mode en sont bien conscients. Ce secteur fait face à de nouveaux défis et doit repenser son modèle pour espérer, un jour, tendre vers plus de durabilité.
Les quatre grands défis du secteur de la mode :
La surproduction,
La surconsommation,
L’impact environnemental des transports,
Les conditions de travail des ouvriers.
La politique RSE Maje :
Courant 2021, Maje s’est lancé dans un projet ambitieux avec la création de “DREAM TOMORROW”. Le concept : repenser la manière de produire, de créer et réduire l’impact de l’enseigne tout au long du cycle de vie du produit.
Cette démarche RSE est basée sur 3 grands piliers :
Product
Planet
People
Dans cette newsletter, nous nous intéresserons essentiellement aux deux premiers piliers en lien avec l’environnement.
La politique RSE de Maje est-elle en accord avec les défis dont fait face l’industrie de la mode aujourd’hui ?
La première étape lors de l’analyse de marque consiste à vérifier si les actions mises en place, sont en adéquation avec les objectifs que s’est fixés la marque.
Dans la majeure partie des cas, vous pouvez trouver ce type d’informations dans un onglet dédié. Ici, l’information est assez compliqué à trouver puisqu’elle se trouve au niveau du footer (le bas de la page web), dans l’onglet MAISON MAJE → DREAM TOMORROW.
PRODUCT :
En premier lieu, aujourd’hui, Maje mets en place plusieurs actions en faveur de conception de produits plus “éco-responsable” via, en partie, l’utilisation de matières certifiées ou recyclées/recyclables, la mise en place d’une fiche de traçabilité, ou la limitation ou la suppression des produits toxiques.
La marque explique sur son site internet, “un vêtement est considéré comme éco-responsable à partir du moment où au moins 50 % de sa composition peut être certifiée comme telle”.
Ainsi, pour la collection Été 2022, 44 % des produits répondaient aux critères de certification éco-responsable. La collection hiver 2022 est, quant à elle, constituée de 50 % de produits éco-responsable. L’objectif d’ici 2025, est d’atteindre plus de 60 % de produits éco-responsable dans les collections.
Maje a également lancé courant 2021, son service de location de vêtements en ligne où sont proposées des pièces d’anciennes et de nouvelles collections, pour les événements.
À l’été 2022, en collaboration avec Fairly Made (start-up française de la green tech), la maison a mis en place un projet de traçabilité. Vous pouvez dès à présent retrouver sur une sélection de produits de l’E-shop et en boutique, des informations sur la provenance et le processus de fabrication de ces produits. L’objectif est d’étendre cette fonctionnalité à 100 % de la collection d’ici 2025.
En second lieu, Maje connaît relativement bien les usines avec lesquelles elle collabore. Elle propose un réel accompagnement de ses partenaires vers l’obtention de certifications environnementales les plus exigeantes, pas seulement la signature d’une charte à appliquer en autonomie.
Mon analyse :
Il est clair qu’aujourd’hui, Maje souhaite repenser sa manière de produire via la mise en place de multiples actions. Les objectifs de la marque sont datés et chiffrés, des vrais plans d’actions sont mis en place et des évolutions sont à noter entre 2021 et 2022.
La marque travaille sur un approvisionnement “éco-responsable” de ses matières phares, via l’utilisation de certification comme Ecowash pour le denim, GOTS pour le coton ou FSC pour la viscose. En revanche, elle ne remet pas en question les matières qu’elle utilise. La viscose, bien que certifiée FSC, nécessite des substances chimiques nocives pour les employés, le polyester dégage des microparticules de plastique qui polluent les océans, ou bien, le procédé de tannage du cuir au Chrome qui émet des substances hautement toxiques pour les travailleurs.
Pour lutter contre la surconsommation, Maje a mis en place des actions concrètes. Le lancement de son service de location est une très bonne solution pour lutter et éduquer ses consommateurs sur ce sujet.
La marque propose également un réel accompagnement de ses fournisseurs via la certification et fait en sorte d’être plus transparent sur sa chaîne de production. En revanche, la marque est impliquée dans le scandale ouïghour ! Elle réfute et affirme qu'elle : « travaille avec des fournisseurs situés partout dans le monde" et sans : "avoir de fournisseurs directs dans les régions mentionnées" (déclaration du groupe SMCP). Cela ne certifie en aucun cas que des fournisseurs indirects ne sont pas impliqués. En effet, il est important de rappeler qu’un marque est responsable de l’ensemble des acteurs qui travaillent sur sa chaîne d’approvisionnement (fournisseurs directs et indirects). La maison ne publie aucune liste de ses fournisseurs, ne réalisent que très peu d’audits et ne partage aucun résultat. De plus, aucun système d’alerte n’est mis en place. Il est donc clair, qu’aujourd’hui, malgré la mise en place d’un projet de traçabilité, il y a encore un gros manque de transparence de la part de la marque.
En ce qui concerne la gestion de fin de vie des produits, aucune indication n’est spécifiée sur le site internet de la marque.
PLANET :
Maje a effectué son premier bilan carbone en 2018, afin d’identifier ses sources majeures d’émission. Une nouvelle étude est actuellement en cours, afin d’évaluer les progrès réalisés depuis 4 ans.
L’une des principales sources d’émissions de la marque, est le transport. L’un des objectifs majeur est de réduire l’utilisation de l’avion à chaque saison. En 2021, la maison a utilisé 52 % d’import aérien, 27 % d’import maritime, 19 % d’import routier et 1 % d’import ferroviaire.
Des plans d’actions sont également mis en place afin d’anticiper la demande, et ainsi, réduire le gaspillage vestimentaire. Par exemple, certaines matières déjà créées n’ayant pas atteint les performances attendues, sont offertes à des associations caritatives, des écoles de modes ou sont transformées en accessoires.
Les boutiques sont également repensées au travers de nouveaux concepts, composés de matériaux respectueux de l’environnement, labellisés, recyclés et sourcés localement.
Toute la gestion de la boutique est ainsi optimisée, des luminaires aux produits d’entretien, afin de réduire les sources d’émissions.
Maje collabore également avec la société de gestion des déchets Cèdre (dont 65 % du personnel est en situation de handicap), leur permettant de recycler les déchets générés au siège.
Mon analyse :
La marque a mis en place une vraie politique de réduction des émissions de CO2, via la diminution des transport aérien, un nouveau concept de magasin et une meilleure gestion des déchets.
En revanche, aujourd’hui, cette politique ne se limite qu’au siège et boutiques et ne s’étends pas à l’ensemble des partenaires de la chaîne de production. De plus, dans le but de réduire ses émissions de CO2, une relocalisation de sa production en Europe ou en France peut être une alternative plus écologique à la simple réduction des transports aériens.
La communication de la marque, est-elle en adéquation avec la promesse qu’elle propose ? :
Les réseaux sociaux :
Sur l’Instagram de la marque, aucune publication n’explique ses engagements, en revanche, nous retrouvons une story à la une “DREAM TOMORROW” regroupant les différentes communications sur le programme.
Cette story est complète est partage de nombreuses données sur les projets effectués. On y apprend par exemple que :
90 % du denim est certifié eco-wash.
44 % du coton est organique ou recyclé.
Ainsi, la marque ne communique pas massivement sur ses engagements et parle essentiellement de ses actions déjà mises en place ainsi que ses résultats à date.
Les fiches produits sur le site internet :
Les références du programme DREAM TOMORROW sont identifiables à l’aide du logo vert disponible sur les fiches produits.
Lorsque l’on se rend sur la fiche du produit, ici le blouson en fausse fourrure et maille, la fiche de traçabilité est très complète. Elle nous renseigne sur l’impact environnemental de la production du produit, son cycle de vie et sa recyclabilité.
Fournir ce type d’information sur chaque produit est une bonne initiative de la marque pour tendre vers plus de transparence.
En magasin :
En magasin, l’utilisation de matières responsables est également renseignée. Par exemple, sur ce top, l’hang tag1 mentionne "viscose éco-responsable".
Cependant, il n’est pas spécifié le pourcentage exact de viscose éco-responsable que contient ce produit. De plus, qu’entend la marque dans le terme “éco-responsable” ? La viscose est-elle certifiée ou recyclée ? Il y a trop peu d’informations.
Conclusion :
La politique RSE “Dream Tommorow” de Maje est ambitieuse et montre un réel souhaite de la part de la marque de tendre vers plus de responsabilités.
La marque partage des objectifs datés et chiffrés et des plans d’actions sont mis en place pour les atteindre. Les actions réalisées pour chacun des piliers répondent aux défis de l’industrie de la mode aujourd’hui. La communication des engagements de la marque est raisonnée et détaillée, mais nécessite plus de clarification sur les produits en magasin (afin d’obtenir plus d’informations n’hésitez pas à directement demander aux vendeurs ou à poser des questions sur les réseaux sociaux de la marque). Nous pouvons donc conclure que la marque Maje ne pratique pas de Greenwashing.
Néanmoins, du chemin reste à faire sur la transparence de la chaîne de production de la marque tant sur le plan humain qu’environnemental.
Afin d’aller plus loin dans sa transition, Maje pourrait choisir de relocaliser sa production afin de réduire son empreinte carbone et de repenser l’utilisation de matières controversées comme la viscose ou le polyester dans ses collections.
Le mot « hang tag » est composé du mot Hang, qui signifie accrocher, et du mot Tag qui signifie étiquette. On parle souvent aussi d'étiquettes volantes ou d'étiquettes américaines. Il s'agit de supports publicitaires et porte-messages particulièrement pratiques.